« Résister se conjugue au présent »

Ce mardi 21 septembre, en séance plénière du Parlement Bruxellois,  nous avons  voté un texte qui rend hommage aux résistants.

Je remercie mes collègues et en particulier Mme Debaets, d’avoir porté cette résolution et rappelé le rôle essentiel de la Mémoire, dans l’éducation en Belgique et dans notre Région.

Faire dialoguer la Mémoire et l’Histoire afin que nous nous rejoignions dans une lecture commune des événements de la Shoah – lecture indissociable de celle de la Deuxième Guerre mondiale est primordiale et ce texte le fait  et mon groupe se félicite de l’avoir cosigné.

Il y a septante huit ans, le 19 avril 1943, l’attaque d’un train de déportés
juifs signe, en Belgique, un acte de résistance unique en Europe, sous le régime nazi. En tout 25.257 Juifs déportés de Belgique, dont 5.093 enfants. Et 5000 personnes vivant en Belgique déportées de Drancy.

Souvent les héros disparaissent des narratifs,  alors que ce n’est pas le cas des collaborateurs, via par exemple, des documentaires qui malheureusement ne contextualisent pas suffisamment, ou la mise à l’honneur de sympathisants nazis, ou encore récemment, le monument de la honte, cette statue érigée encore dernièrement à Zedelgem, à la gloire des Waffen SS lettons, ayant participé à l’extermination des Juifs en Lettonie. Son habillage douteux en ruche, symbole de la paix n’est qu’un leurre dont les autorités communales n’ont pas voulu prendre la mesure. Pourtant, il est de notre responsabilité politique de démasquer toutes les tentatives de réhabilitation du fascisme.

Les résistant.e.s eux, et elles,ont pris un risque au péril de leur vie. Ils ont opéré dans la presse clandestine, fait des actes de sabotage, œuvré comme agent de renseignement, et d’action, caché des enfants et des adultes, fait de faux-papiers, obtenus des timbres de ravitaillement, ouvert les courriers postaux de convocation et prévenu ceux et celles en danger.

Si ma génération a pu naitre, celle qu’on appelle la 2è génération,  si je suis là aujourd’hui, parmi vous, enfant d’enfant cachée, c’est sans doute grâce à ceux, à celles, qui ont osé braver les nazis et leurs collaborateurs à travers l’Europe et sauvé des milliers d’enfants juifs et des adultes traqués qui ont été soustraits à la barbarie nazie.

L’histoire de chaque survivant.e est celle d’un miracle et de 1940 à 1944, la Résistance belge développa une organisation complexe que nous saluons.

Face à la disparition progressive des témoins et des changements que cela implique au niveau du travail de Mémoire, mais aussi en regard du réveil des nationalismes, du développement croissant des extrémismes, du racisme et de l’antisémitisme, il est essentiel de montrer que même dans les heures les plus noires  de la guerre, le courage individuel, la solidarité et le sens de la dignité peuvent offrir une alternative d’espoir à la forme la plus barbare de la nature humaine.

Les 3 résist ants, Youra Livchitz, Jean Franklemon et Robert Maistriau Yovont à vélo,  quatre tenailles, une lampe-tempête et un pistolet dans leurs sacoches attaquer un convoi de déportés.

Celui-ci emporte 1 631 juifs, dont 262 enfants. Parmi ceux-ci figure le plus jeune bébé qui sera déporté de Belgique à Auschwitz : Suzanne Kaminiski  âgée d’un mois. Si toutes les victimes n’étaient pas juives, tous les Juifs étaient des victimes, rappelait Elie Wiesel.

Ce monument sera tel un maillon entre le passé et le présent. Au-delà de ces 3 résistants, c’est un hommage à tous ceux et celles qui ont été courageux et ont résisté à l’occupant.

Mon groupe est  convaincu que poursuivre la transmission de la Mémoire est plus nécessaire que jamais. Raconter. Expliquer. Encore et toujours. Nourrir les réflexions des jeunes générations qui, fort heureusement, n’ont pas connu la guerre et qui ne conserveront de l’Histoire que les notions qui leur en auront été transmises par ceux et celles qui l’ont vécue et qui ont réussi à survivre, et par ceux et celles qui la leur enseignent aujourd’hui.

Mais il faut aussi apprendre à ne pas rester silencieux, à intervenir.

Monsieur le Président, chères et chers collègues, se souvenir de la Shoah n’est effectivement pas une fin en soi. Il est l’une des pierres angulaires des valeurs européennes. Nous ne pouvons changer l’Histoire mais les leçons de l’Histoire peuvent nous changer disent souvent certains les politiques.  Résister se conjugue au présent disait Lucie Aubrac. Au nom de la démocratie, au nom de ceux et celles qui ont perdu leur vie, déporté.e.s et résistant.e.s,  au nom de ceux et celles qui pleurent encore leurs familles disparues, et pour garder notre dignité, nous continuerons à nous élever contre toute tentative d’expression de fascisme et toute tentative de négationnisme mais aussi contre toutes les formes de racisme, d’antisémitisme et toutes les discriminations.   Ce texte y contribue.

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