Rejoignez le cercle des résistants

1891100_10152154459467974_1114987097_n-3Une carte blanche que j’ai rédigée sur proposition de LaLibre.be suite à un acte antisémite dans un train belge.

Consultable sur : http://www.lalibre.be/debats/opinions/train-pour-auschwitz-les-juifs-pries-de-descendre-prendre-une-douche-52f476523570516ba0b622db

Belgique 2014. L’antisémitisme n’a pas disparu.
Il est toujours tapi. Sous différentes formes. Dans différents milieux. Sournoisement ou ouvertement. Banalisé. Impuni.
Il faut le dénoncer, le condamner. Systématiquement.
Comme je l’explique dans mon livre*, une agression, une insulte, une injustice à l’égard d’un Juif ne sont ni plus ni moins condamnables que celles qui frappent n’importe quelle autre personne.
Il faut systématiquement les dénoncer.
Pourquoi alors faire de l’antisémitisme un cas particulier ?
La réponse se trouve dans l’histoire de l’Europe. L’antisémitisme n’est, en effet, pas un racisme ordinaire parce que sur ce continent, et avec la complicité de nombreux États et populations, il a permis le génocide qui porte le nom de Shoah .
Depuis l’Antiquité, la forme de haine ancestrale qu’est l’antisémitisme ressemble par moments à une phobie collective. Une hydre politique et intellectuelle, une maladie incurable qui resurgit après une période plus ou moins longue d’incubation. Le virus peut rester inactif de longues années mais lorsqu’il se réveille, il semble à chaque fois plus violent, plus résistant aux antidotes, aux réactions. Une maladie, contagieuse de surcroît, dont il semble que la société occidentale ne puisse guérir et qui peut prendre des formes diverses. Parfois même une mutation s’opère et c’est une nouvelle physionomie qui apparaît : on ne la voit pas, on ne la reconnaît pas, on l’ignore ou l’on cherche ailleurs le microbe. C’est pourquoi, dès que le malaise paraît, il faut le soigner ! Car lorsque l’antisémitisme prend un nouveau visage, il est difficile de le distinguer ; il est plus simple de l’occulter ou pire encore, de l’excuser.
Ainsi l’antisémitisme en Belgique régnait dans les milieux catholiques et d’extrême droite. Aujourd’hui – depuis le tournant du siècle et la 2è Intifada-, s’y rajoute un antisémitisme de gauche et d’extrême gauche, un négationnisme virulent, et un antisémitisme lié au conflit du Moyen Orient exprimé à travers un antisionisme décomplexé.
Un exemple, que j’ai dénoncé le 18 novembre 2011: Océane, une jeune fille de 13 ans est agressée et insultée par d’autres jeunes filles au Centre sportif de Neder-Over-Hembeek. « Sale juive », des gifles, puis, je cite : « ferme ta gueule sale juive et retourne dans ton pays». Elle est attrapée par les cheveux et ruée de coups. Océane a eu une commotion cérébrale, des vertèbres enflammées et surtout très peur. Les insultes avaient déjà commencé depuis plusieurs mois. Les menaces ont continué bien après les faits… En état de choc physique et psychologique, Océane a porté plainte à la police de Bruxelles.
Autre exemple que j’ai dévoilé en mai 2012: dans le train de 16h51 reliant Namur à Bruxelles, les passagers ont pu entendre via les haut-parleurs l’annonce, ahurissante, suivante : « Bienvenue dans ce train à destination d’Auschwitz. Tous les Juifs sont priés de descendre à Buchenwald ». Une plainte a été introduite auprès du service médiation de la SNCB.
Récidive ce vendredi 31 janvier 2014: vers 17h12, avant l’arrivée à Ottignies du train reliant Liège à Bruxelles via Namur d’un événement similaire: « Mesdames et messieurs, nous allons à Auschwitz. Tous les Juifs sont priés de descendre prendre une petite douche ». Le fait serait bien connu de la SNCB et des contrôleurs : des jeunes, possédant manifestement une clé, ont accès au micro, comme l’ont révélé plusieurs plaisanteries ces deux dernières années sur cette ligne. Sauf que les autres « plaisanteries » ne sont pas à caractère « racistes » contre qui que ce soit.
Depuis les cours de récréations scolaires aux transports en communs, depuis les sites internet aux tags et grafittis, depuis les menaces aux violences verbales et physiques aujourd’hui la parole antisémite est libérée. Les jeunes – malheureusement souvent d’origine immigrée- comme les adultes se laissent aller à l’envie. Le problème se trouve tant au niveau de l’éducation, qu’à celui des silencieuses réactions politiques et médiatiques. La loi, hélas, ne permet pas toujours une sanction. La dénonciation et la condamnation des propos et des actes sont donc civiquement vitales. Indispensables à la cohésion de notre société. Elles doivent donc intervenir à chaque acte ou parole. Sans cela, nous basculerons vers une impunité et une banalisation de ces faits. Nous en prenons malheureusement déjà le chemin. Rejoignez le cercle des résistants.
* « Salomon, vous êtes juif?! Histoire de l’Antisémitisme en Belgique du Moyen-Age à Internet », Ed. Luc Pire, décembre 2008- préface de Luc Dardenne

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