Plusieurs personnalités politiques et associatives sont aujourd’hui pointées du doigt pour le soutien qu’elles ont apporté il y a quelques années à la cause de la libération de celui qui est considéré aujourd’hui le terroriste le plus recherché de Belgique, le Bruxellois Oussama Atar, qui a été libéré de prison en Irak en 2012 en raison de la « détérioration de son état de santé ». Ces personnalités gardent aujourd’hui un silence diplomatique ou tentent de se justifier.
On se souvient, à l’époque la pathologie d’Atar était « lourde et nécessitait des soins d’urgence ». La guérison de son « cancer » fut miraculeusle et celui-ci s’est révélé n’être qu’une simple infection ! Pour le soutenir, il y avait les député-e-s Zoé Genot, Jamal Ikazban, Ahmed El Khanouss, mais aussi Youssef Handichi. Les mêmes qui ont rejoint en 2015 la grève de la faim pour « mauvais traitements » envers Ali Aarrass. De nombreuses et nombreux député-e-s ont aussi rejoint la liste des signataires pour demander sa libération, dont Ozdémir, Ikazban, Ahidar, El Yousfi, Khattabi( aujourd’hui co-présidente d’Ecolo),…
Car c’est un fait, ceux et celles qui se sont mobilisé-e-s pour Oussama Atar, se sont également mobilisé-e-s pour Ali Aarrass et ne lui ont, à ce jour pas retiré leur soutien. Ils utilisent d’ailleurs la même rhétorique, les mêmes arguments sur l’innocence, l’état de santé ou la double nationalité du prisonnier, ils font le même reproche d’inaction aux ministres des Affaires étrangères ou de la Justice. Ils ont le même avocat et sont soutenus par la même organisation, Amnesty International. Cette dernière précise bien sûr qu’elle ne demande pas « leur libération » ( sic) mais veut intervenir sur leur état de santé ou les tortures dont ils seraient l’objet… L’ONG rappelle d’ailleurs qu’ « elle condamne avec force tout acte terroriste » (nous voilà soulagé-e-s !) Mais dans sa pétition pour Aarrass, Amnesty demande bien sa libération.
Atar, qui disait acheminer du matériel médical en Irak, a été soupçonné de livrer clandestinement des armes aux rebelles qui combattaient les Américains et à des groupes djihadistes. Son avocat en Belgique, Me Lurquin, à l’époque également député Ecolo, expliquait: « Existe-t-il une volonté politique pour prendre cette affaire en main ou est-ce qu’il porte le mauvais prénom ? (…) Oussama est Belge. Ce n’est pas un terroriste, ni en a-t-il le profil[1]. »
C’est vrai qu’il ne pouvait pas l’imaginer l’avocat en 2010, que ce « citoyen modèle » pourrait bien avoir deux ou trois choses à se reprocher.
Toutefois, on peut être surpris quand le 9 aout 2016, il y a deux semaines, on voit le même Me Lurquin s’obstiner dans le même genre de rhétorique à côté d’un panneau tenu par Farida, la sœur de Ali Aarrass, disant « mêmes droits même protection pour les binationaux ». Toujours pas de remise en question à propos d’un autre « citoyen modèle », accusé cette fois de complicité avec Abdelkader Beliraj.
Abdelkadher Beliraj, un autre client de Me Lurquin, est suspecté d’appartenance à une organisation terroriste dans les années 80 et de six assassinats politiques à Bruxelles et condamné à perpétuité au Maroc. Parmi ses victimes, le recteur de la Grande mosquée de Bruxelles et le docteur Joseph Wybran, professeur en médecine à l’ULB et président du comité de coordination des organisations juives de Belgique.
Qu’on ne prétende pas que les cas Atar et Aarass sont sans similarités! Sur le site « http://www.freeali.eu/, » on retrouve, par exemple, dans une lettre de 2012 un texte qui les relie de la manière la plus explicite. Extrait :
« A travers toi,
Nous avons compris que la lutte antiterroriste n’est qu’un slogan, qui n’a pas besoin de preuves ni de faits matériels, les intentions suffisent, les dénonciations obtenues sous la torture suffisent, et qui sert à protéger les intérêts des puissants et de leurs bourreaux (…).
Nous avons ce soir
Une pensée particulière pour le belge Oussama Atar, détenu depuis 10 ans en irak ;
Une pensée pour le belge Abdelkader Belliraj, détenu depuis quatre ans au Maroc et condamné à perpétuité;
Une pensée pour le belge Hicham Bouhali Zriouil[3], détenu au Maroc depuis octobre 2011 après avoir été illégalement extradé par la Syrie au Maroc, pays qu’il n’a jamais connu et qui l’a condamné à 20 ans de prison;
Une pensée pour Malika Al Aroud[4], prisonnière dans la prison de Berkendael;
Une pensée pour le tunisien Nizar Trabelsi[5], prisonnier à la prison de Hasselt, (…) qui reste en prison en attendant son extradition vers les Etats-Unis »
Comment ne pas s’étonner de cette énumération de terroristes avérés dont on demande la libération au nom d’une innocence présumée malgré les procès à l’issue desquels ils ont été condamnés.
Qu’en 2010 certain-e-s élu-e-s et associations humanitaires n’aient pu anticiper les faits de terrorisme qui se déroulent de manière soutenue depuis les attentats à Toulouse en 2012, on ne peut leur en faire le reproche. Mais qu’ils aient décidé depuis le début d’ignorer que des combattants aient rejoints d’abord Al Quaida puis Daesh et continuent encore en 2016 à tenir le même discours, tient par contre de la faute. Ces responsables politiques, ces représentant-e-s du monde associatif et ces militant-e-s s’obstinent dans la même rhétorique : victimaire accompagnée des mêmes reproches au gouvernement…On n’ose imaginer la complaisance, ce serait donc de l’aveuglement?
Viviane Teitelbaum
[1] dans un article publié sur le site http://www.freeali.eu/la-famille-atar-face-aux-fausses-promesses-du-gouvernement-belge le 9 décembre 2010
[2] Enseignant en prison – http://www.freeali.eu/la-famille-atar-face-aux-fausses-promesses-du-gouvernement-belge/
[3] Il s’est rendu en Afghanistan où l’intéressé aurait combattu pour le compte d’Al-Qaïda.L’homme a été jugé dans le cadre du procès de Malika El-Aroud, la veuve de l’un des meurtriers du commandant Massoud
[4] Elle avait écopé de huit ans de prison pour avoir dirigé un groupe terroriste en Belgique, recrutant via le web des volontaires musulmans pour aller se battre en Afghanistan. Sur son site elle incite les musulmanes à mener la guerre sainte
[5] islamiste tunisien condamné pour une tentative d’attentat et extradé vers les USA