Changements climatiques, actions, ambition et égalité

Mon intervention de ce vendredi dans le DÉBAT SUR LA PRÉPARATION PAR LE GOUVERNEMENT DE LA 21E CONFÉRENCE DES PARTIES DE LA CONVENTION CADRE DES NATIONS UNIES SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES (PARIS 2015)
PLÉNIÈRE DU VENDREDI 2 OCTOBRE 2015

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Madame la Ministre,
Chèr-e-s Collègues,

La 21e conférence des parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques en décembre prochain est stratégique.
40 000 participant-e-s, délégué-e-s, observateurs et observatrices, membres de la société civile se réuniront à Paris pour l’une des plus grandes conférences climatiques jamais organisées : c’est en effet le principal forum multilatéral concentré sur le traitement du changement climatique, avec une participation quasiment universelle des pays. L’enjeu, nous le connaissons toutes et tous: aboutir à un accord contraignant, applicable à tous les pays à partir de 2020, permettant de lutter efficacement contre le dérèglement climatique dans l’espoir de maintenir le réchauffement mondial en deçà de 2°C d’ici au 22è siècle et d’atteindre, au plus vite, une économie résiliente et sobre en carbone.
Le 5ème rapport du GIEC, publié en plusieurs parties en 2014, a confirmé la gravité de la situation : selon un scénario possible, le réchauffement global pourrait dépasser les 4° d’ici 2100 si la tendance actuelle de consommation des énergies fossiles n’est pas inversée, ainsi que la déforestation.
Pour atteindre ces objectifs, il faudra donc réaliser des changements importants dans le secteur de l’approvisionnement en énergie, et réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre.
D’ores et déjà les effets des changements climatiques se font sentir notamment dans les zones les plus fragiles : événements climatiques intenses, sécheresses, pluies diluviennes, inondations, hausse du niveau des mers.
Nous devons réagir! Et quand je dis nous, c’est nous toutes et tous. Sans se renvoyer la balle d’un pays à l’autre, d’un niveau de pouvoir à l’autre, d’un parti à l’autre, d’une stratégie à l’autre, d’une personne à l’autre. Si nous ne nous responsabilisons pas toutes et tous, chacun-e d’entre nous, nous laisserons à nos enfants un avenir hypothéqué.
Le défi est de taille. Comme l’a dit le président américain « il n’y a pas de plan B »
Les émissions mondiales de CO2 devront impérativement diminuer dans les prochaines décennies.
La production d’électricité, mais également l’agriculture et l’industrie, ensuite les transports et enfin le résidentiel et le tertiaire constituent les éléments des stratégies de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Pour tous ces domaines nous connaissons les constats, et certaines des solutions et alternatives je ne rentrerai donc pas dans les détails.

Cela devra être accompagné d’une modernisation à grande échelle, tant des industries que des mentalités, du remplacement de technologies énergivores par les meilleures technologies disponibles.
Des innovations et des activités de collaboration entre les entreprises et entre les secteurs, le partage des infrastructures, de l’information, de l’utilisation de la chaleur résiduelle, etc. Mais aussi la réduction et le traitement des déchets, ainsi que leur réutilisation, le recyclage et la récupération d’énergie. Car tout est dans tout.

Il faut donc à tous niveaux accepter de modifier les comportements et ce n’est pas simple.

Que ce soit à travers des mesures de sensibilisation, des systèmes de quotas et d’échanges -s’ils sont contraignants et ambitieux-, des politiques fiscales tout en faisant attention à la croissance économique. Car aux problématiques environnementales s’ajoutent évidemment les considérations économiques. Notre époque nous impose de faire preuve de créativité et d’ingéniosité afin d’atteindre le meilleur rendement énergétique de façon réaliste et en gardant à l’esprit l’impact de chacune de nos décisions sur l’industrie, sur l’emploi et sur le coût de l’énergie.

Les investissements et les marchés publics doivent donc se faire de manière cohérente. Ceux-ci devrons soutenir l’économie tout en orientant les choix vers des filières sobres en carbones. Isolation des bâtiments, mobilité, approvisionnement en énergie, valorisation des déchets etc. Toutes des matières pour lesquelles la Région est compétente et peut donc apporter sa pierre à l’édifice.

Je voudrais également attirer l’attention sur l’importance de la prise en compte du genre dans les discussions climatiques, ce que « Le groupe Genre et développement soutenable » et les associations de femmes européennes mettent en évidence à l’approche de cette conférence.
Il est maintenant largement reconnu que « Les femmes sont affectées de manière disproportionnée par les impacts du changement climatique, tels que les sécheresses, inondations et autres événements météorologiques extrêmes, mais elles jouent aussi un rôle essentiel dans la lutte contre le réchauffement climatique. » Les femmes, parce qu’elles représentent 70 % des personnes pauvres dans le monde et du fait de leurs rôles socialement construits, sont particulièrement touchées (eau, forêt, agriculture, pêche … ) alors qu’elles consomment en moyenne moins d’énergie. Les catastrophes climatiques ont des conséquences spécifiques en matière de violences de genre, de migration et de réfugiées.
Par contre les négociations et les groupes de travail scientifiques sont majoritairement menés par des hommes. Lors de différentes conférences les questions de genre ont été progressivement et partiellement prises en compte. La Cop20 à Lima, dont le résultat global est décevant au regard de l’urgence climatique, a par exemple débouché sur le lancement d’un programme de travail sur le genre « Lima Work Programme on Gender »
Malgré ces prises de conscience de l’importance d’une approche de genre, on peine à avancer.
La Belgique, pourrait insister pour que l’on inclut dans le socle général la prise en compte du genre dans l’ensemble des politiques environnementales, économiques, sociales et en matière de participation équitable de l’ensemble des acteurs et actrices de la société civile. L’égalité femmes-hommes, l’autonomisation des femmes, la lutte contre les violences fondées sur le genre – avec un accent particulier mis sur les effets des conflits environnementaux et sur la situations des réfugiées climatiques – constituent un enjeu transversal qui conditionne le développement humain durable.

Dès lors Madame la Ministre vous pourriez plaider afin d’assurer la parité dans tous les processus des négociations climats et tous les mécanismes climat mis en place :
Pour commencer vous pourriez demander de financer la représentation systématique de groupes de femmes ayant des actions sur le terrain (eau, assainissement, déchets, semences, agroforesterie, agriculture vivrière, énergie rurale etc.) ainsi que des femmes migrantes et des réfugiées.
Vous pourriez demander de prendre le genre en compte dans l’ensemble des textes et mécanismes de prévention et d’atténuation du changement climatique ainsi que dans l’ensemble des objectifs et indicateurs des Objectifs de développement durable post 2015, sans oublier ceux se rapportant au climat et à l’environnement.
Vous pourriez demander de rappeler l’obligation d’intégrer une perspective de genre et de budgétisation sensible au genre dans toutes les stratégies climat énergie, de développement durable et les agendas 21, ainsi que les politiques agricoles et les stratégies concernant la biodiversité, la lutte contre la désertification ; créer des outils pour aider les acteurs et actrices notamment les collectivités territoriales à intégrer le genre dans ces politiques et stratégies.
Vous pourriez proposer de promouvoir la participation à la Cop21 des organisations travaillant sur les questions genre, développement durable, climat et d’intégrer une perspective de genre dans les processus de transition écologique et transition énergétique ainsi que dans les différents programmes ayant un lien direct avec le climat comme la biodiversité.
Il y a d’autres éléments mais on pourra y revenir…
Et enfin, vous pourriez demander de manière plus globale, comme la commune d’Uccle l’a proposé dans une résolution votée à l’unanimité, vous pourriez proposer de prendre les mesures nécessaires afin de réduire d’au moins 40% nos émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, d’augmenter la part d’énergies renouvelables sur notre territoire afin d’atteindre les 27% et d’améliorer l’efficacité énergétique de 30%.

Nous devrons prendre en compte chacun de ces éléments en vue d’amener des propositions à la conférence de Paris. Nous devrons être clairs et déterminés. Malheureusement, aujourd’hui, cela ne semble pas être le cas. En effet, si chacun-e d’entre nous s’accorde à dire que des mesures doivent être prises, la méthode n’est toujours pas au point.

Trois points restent en effet en suspens et nous espérons que vous pourrez nous faire part d’avancements aujourd’hui. En effet, si l’Union européenne a défini un cadre grâce aux objectifs du paquet énergie climat 2030, il nous fallait toutefois encore nous prononcer sur le caractère contraignant de ces objectifs, déterminer s’il s’agit d’un seuil minimal à atteindre ou de plafond et fixer les modalités de répartition de l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Par ailleurs, les différentes entités fédérées semblent incapables de trouver un accord sur le partage des efforts à accomplir dans le cadre des objectifs fixés pour 2020.
Or, la Région, en tant que présidente de la Commission nationale climat, a un rôle primordial à jouer dans la définition de la position commune à présenter et défendre. La situation de désaccords dans laquelle se trouve le pays affaiblit la crédibilité de la Belgique quant à sa capacité à respecter ses engagements.

Dès lors, plusieurs questions restent en suspens et nous souhaiterions, Madame la Ministre, obtenir des éclaircissements:
– Quelle est, en définitive, la position de la Belgique sur les engagements du paquet climat-énergie 2030? Quid du caractère contraignant? Etes-vous parvenue à un consensus avec les autres entités? Quid de la méthodologie de la répartition des objectifs entre Etats?
– Quels engagements d’atténuation la Belgique va-t-elle présenter à la conférence de Paris? Quelle en est la part de la Région? Comment notre Région va-t-elle agir pour rencontrer ces objectifs?
– Quels sont les objectifs d’adaptation envisagés par notre Région?
– Quelle position comptez-vous prendre sur la prise en compte du genre dans les discussions climatiques ?

Ces mesures qui devront in fine conduire à des changements dans les comportements individuels et collectifs et qui seront porteurs d’espoir pour les générations à venir.
En ce sens pour conclure je voudrais citer Einstein qui disait « la folie c’est de se comporter de la même manière et de s’attendre à un changement »

Je vous remercie pour vos réponses

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