Bloc-notes

Antisémitisme: des excuses de circonstances ne suffisent pas, ne suffiront jamais

Réponse à la Carte blanche du directeur d’ENAR

Alors que se clôture la foire musulmane, il nous faut revenir sur l’affaire Al-Suwaidan, ce prédicateur antisémite récemment interdit de séjour en Belgique.
Tarek Al-Suwaidan déclarait il y a quatre mois « Toutes les mères de la Oumma, pas seulement les mères palestiniennes doivent nourrir leurs bébés à la haine des fils de Sion. Nous les haïssons, ils sont nos ennemis et nous allons instiller cette haine dans l’âme de nos fils jusqu’à ce qu’une nouvelle génération se lève et les efface de la surface de la terre ».
Depuis, il a présenté ses excuses.
Difficile d’y croire.
Difficile, vraiment.
Cet appel à la haine provient d’une personne qui fait profession de convaincre et de mobiliser toute une communauté. Ses excuses arrivent plusieurs mois après les faits, uniquement à la suite d’une médiatisation récente. Peut-être pas tellement parce que ce personnage tient à tout prix à visiter notre pays, mais plus simplement parce qu’il s’aperçoit des dégâts que l’exposition publique de son antisémitisme pourrait faire à son image en Europe.
Ce sont, bien évidemment, des propos qu’aucun leader imprégné de valeurs de respect et de démocratie n’aurait jamais prononcés.

Pour cette raison, le gouvernement belge a décidé, à raison, de lui interdire l’accès au territoire.
Pour cette raison aussi, la diffusion de ses discours à la télévision a aussi été interdite
. Peu importe que ses discours soient accessibles sur internet. L’important est que l’on sache qu’il ne sont pas et ne seront pas tolérés en Belgique.
Monsieur Al-Suwaidan pensait-il vraiment que présenter des « excuses » pourrait suffire à éviter la sanction à laquelle il s’était exposé? Peut-être aurions nous pu commencer à le croire si, par exemple, il avait simplement dit « cette affaire m’a convaincu que j’avais été beaucoup trop loin et je comprends pourquoi les Belges ne peuvent pas me recevoir, je vais m’astreindre à quelques mois de recul, de silence et de réflexion ». Mais non, M. Al-Suwaidan a pensé que de vagues « excuses » suffiraient à lui permettre de venir faire sa conférence en Belgique.
Sachez donc, M. Al-Suwaidan, que ce n’est pas ainsi que ça se passe. Le fait d’être un personnage public et de s’exprimer en pleine connaissance de cause entraîne une responsabilité énorme que des excuses de circonstances ne sauraient suffire à effacer.
Mais pourquoi, vous demanderez-vous sans doute, souhaitons-nous nous exprimer à nouveau sur ce dossier qui peut être considéré comme clos ?
C’est tout simplement parce que nous sommes extrêmement choqué-e-s qu’un autre personnage public, M. Michael Privot, s’exprimant au nom d’une association dénommée EmBeM (pour Empowering Belgian Muslims), soit récemment venu à la rescousse de M. Al-Suwaidan dans un texte diffusé sous forme de carte blanche.
Dans ce texte, M. Privot parle de « rendez-vous manqué ». Selon lui, il aurait fallu inviter comme le représentant d’un islam qui aurait su évoluer vers plus d’ouverture. Selon M. Privot, la présence de Al-Suwaidan à Bruxelles aurait délégitimé « tout amalgame haineux entre Juifs et partisans du sionisme, idéologie qui, rappelons-le, n’est pas exemptée de la critique ou de la contestation ». On croit rêver quand on se souvient que le propos tenu par M. Al-Suwaidan n’est rien moins qu’un appel au meurtre de masse. Pire encore: un appel aux mères à alimenter leurs enfants à la source de la haine, de la violence et du meurtre! Le fait que M. Al-Suwaidan ait déclaré ne pas être antisémite suffirait donc à l’absoudre de ce genre de propos? On croit rêver aussi quand on se souvient que M. Privot est aussi le directeur d’ENAR, un important réseau européen de lutte contre le racisme. Pourtant ce n’est pas la première fois que ses réactions sont ambivalentes quand il s’agit de condamner des formes d’antisémitisme.
Sachez donc, Monsieur Privot, que ce n’est pas ainsi que ça se passe. Le fait d’être un personnage public et de s’exprimer en pleine connaissance de cause entraîne une responsabilité énorme que des excuses de circonstances ne sauraient suffire à effacer.
Dans ce contexte, comment encore vous prêter une quelconque légitimité pour représenter le combat contre la haine et le racisme en Europe ?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.