Ne gardons que le son!
« Mettons le sexisme hors-jeu, carton rouge pour Damso ! », c’est ainsi que je commençais mon billet d’humeur il y a une semaine.Oui, j’ai estimé plus que choquante la décision de l’Union belge de choisir le rappeur Damso pour réaliser l’hymne officiel des Diables rouges à la Coupe du monde 2018, et je l’ai clamé haut et fort.
Damso, c’est un rappeur dont de nombreuses chansons sont des incitations à la drogue, au harcèlement, à la violence.
Un rappeur dont les paroles d’une chanson – il faut le rappeler et oser le dénoncer – sont insultantes et dégradantes pour les femmes: « J’ai séché les cours, pour mouiller des chattes pendant que j’ai le barreau, bitch Ouais, ouais, ouais, ouais, ouais La pute est oblique, la pute a trop valsé (valsé) Pas de quenelle en publique, sinon Manu va valser (valser) (…) Tu veux de la coke, j’ai que de la poudre à canon Drapapapa j’te kill, à qui la faute ».
Un rappeur dont le dernier clip réalisé avec Vald « pose un réel problème vis –à-vis des femmes et tombe dans le sexisme » écrit même les Inrocks.
Un rappeur dont le clip « Bruxelles Vie » montre des jeunes cagoulés et on y entend des paroles qui peuvent à nouveau inciter à la violence, l’usage de drogue ainsi que des propos dénigrants sur les femmes.
Depuis ce billet j’ai reçu des tweets s’inspirant du vocabulaire du rappeur, et on m’a traitée de « féministe emmerdeuse » qui doit retourner dans sa cuisine « idiote opopop à la cuisine »…et enfin le dérapage antisémite classique auquel on ne s’habitue pourtant jamais comme «vous ne seriez pas par hasard de sang d’une certaine communauté tant détestée dans le monde ? Cela ne m’étonnerais pas 😉Viviane Teitelbaum ».
Puis arrive le tweet de Damso : « merci pour cette belle publicité les copains là si j’annonce un album je peux battre Orelsan qui sait #BonjourChezToiViviane »
…… Orelsan, en voilà une magnifique référence, ce rappeur qui a été condamné à une amende de 1000 euros avec sursis pour injure et provocation à la violence envers les femmes, pour certains textes de ses chansons interprétées lors d’un concert à Paris en mai 2009. Il avait fait appel de ce jugement rendu le 31 mai 2013. En première instance, le tribunal correctionnel de Paris avait considéré la phrase « les féministes me persécutent (…), comme si c’était d’ma faute si les meufs c’est des putes», comme une injure sexiste. Pour « renseigne-toi sur les pansements et les poussettes, j’peux t’faire un enfant et t’casser le nez sur un coup de tête», ainsi que «ferme ta gueule ou tu vas te faire marie-trintigner (…)», Orelsan avait été reconnu coupable de «provocation à la violence à l’égard d’un groupe de personnes en raison de leur sexe».
Donc Damso pourrait gagner le match (de l’indécence, du pognon ?) face à Orelsan… Joyeux, tout cela, non ?
Si. A tel point que, par un tweet, Coca Cola, sponsor de l’Union Belge, très à cheval sur les valeurs familiales et sportives, dit « prendre les remarques au sérieux et contactera l’Union belge ».
Un frémissement ?
Quoique Damso ait annoncé avoir terminé le son de l’hymne, je suis en droit de penser qu’il pèsera chaque mot, qu’il prônera ce que le football doit représenter pour des dizaines milliers de jeunes belges (au féminin et au masculin), et qu’il l’interprétera en mode (Dam)sotto voce.
L’Union belge a précisé et (r)assuré qu’elle le vérifierait. C’est à tout le moins son rôle. Le foot c’est aussi éduquer les jeunes joueurs et joueuses et supporters à respecter des valeurs sociétales, non ?
Mais cela ne change pas son passé, ni ses messages. Alors ne gardons que le son, un bon gros son de tous les Diables, sans les paroles, ça nous fera des vacances en Russie.