inauguration des pavés de mémoire à Ixelles
Voici mon intervention lors de l’inauguration des pavés de la mémoire à Ixelles ce mardi 28 avril, en présence de Paul Sobol, survivant d’Auschwitz et d’élèves d’écoles ixelloises
Monsieur le Bourgmestre, Madame l’Echevine,
Très cher Paul Sobol,
Très cher-e-s élèves,
Cher-e-s ami-e-s,
Je voudrais tout d’abord remercier les membres de l’Association pour la Mémoire de la Shoah, pour leur engagement, leur ténacité, leur détermination à poursuivre ce combat utile et encore si nécessaire. Voilà presque 3 ans M. le Bourgmestre, que les poses des pavés de la Mémoire sont un moment important et émouvant dans l’histoire de notre Région, et en particulier de certaines communes. Et je suis pour ma part particulièrement émue que cela se fasse dans ma commune, que nous, citoyen-ne-s ixellois-es, souhaitons nous retrouver dans une lecture commune des événements de la Deuxième Guerre mondiale. Car le souvenir de la Shoah ne pourrait en aucun cas devenir l’affaire des seules victimes.
Il y a septante ans, le monde découvrait les charniers, les chambres à gaz, les camps d’extermination et de concentration, les massacres, l’extermination systématique des Juifs, des Tsiganes, des handicapés, des homosexuels par le régime nazi au nom d’une idéologie raciste, xénophobe et fasciste. Mais si le terminus de l’Histoire était, pour beaucoup de déportés de Belgique, situé à Auschwitz, leur périple a commencé ici dans nos rues, nos quartiers quand les nazis – avec la complicité des autorités belges- sont venus les arrêter, les rafler à la vie, à leurs familles. C’est ici qu’on a vu arriver des camions, entendu le bruit des bottes, les coups frappés aux portes arrachant hommes, femmes et enfants au sommeil d’abord, à la vie ensuite. Car les rafles étaient organisées dans l’obscurité de la nuit. Réveil brutal, panique, terreur, affolement. Les pas rapides et secs des bottes SS dans l’escalier, hurlements, coups. Derrière la porte, les coeurs s’arrêtent de battre, la respiration est coupée. Une main est posée sur la bouche de l’enfant. Peut-être, oublieront-ils d’entrer… Quelques minutes plus tard : « Ouvrez, sales Juifs ! » Tout le monde est embarqué. C’est bien ici en Belgique mais aussi à Ixelles, que tout a commencé…
Toutes les victimes n’étaient pas juives, mais tous les Juifs étaient victimes. Tout ce qui était l’Autre, différent, était persécuté voire assassiné.
C’est ici que nous nous retrouvons aujourd’hui pour penser ensemble à la vie de ceux que l’Histoire a abandonnée lâchement, tristement, brutalement.
Pour transmettre ce qui s’est passé ici, pour lutter contre l’oubli, contre les négationnismes de tous les génocides y compris arménien et tutsi, ces pavés font œuvre de « passeur de mémoire ».
Car ces pavés de la mémoire sont une manière de trouver le courage, une approche originale pour un dialogue audacieux dans des quartiers où les immigrés d’hier rencontrent ceux d’aujourd’hui. Et où le racisme et l’antisémitisme sont malheureusement trop souvent présents. Les raisons invoquées sont nombreuses, elles n’en sont pas moins inacceptables et nous ne pouvons les accepter.
Les pavés d’hier étaient les témoins de ceux qui ont été arraché-e-s à leur destin. Ces pavés aujourd’hui doivent devenir un message d’espoir, un maillon d’une chaîne de transmission, de l’histoire, mais aussi de nos valeurs démocratiques.
Il y a deux mois j’étais à Auschwitz avec Paul Sobol. Je l’ai entendu témoigner. Prendre son petit fils par la main et lui montrer là où il a survécu. Ce lieu qui représente le crépuscule de l’humanité où la mort rôdait.
Moi, enfant d’enfant caché, aujourd’hui députée et échevine, je ne m’adresse pas seulement à mes collègues mais à tous les mais aussi ) tous les riverain-e-s et habitant-e-s de ce quartier. Je sollicite votre imagination, votre énergie qui vous permettra peut-être de reconnaître d’autres Autres dans le respect de chacun, et de son identité. Car c’est une manière aussi de combattre de l’extrémisme, le fascisme, le sexisme, l’homophobie, toutes les discriminations et je le souligne particulièrement aujourd’hui : l’antisémitisme.
Monsieur le Bourgmestre, cher Paul ; cher-e-s collègues, cher-e-s élèves, cher-e-s ami-e-s, c’est ensemble que nous devons nous engager pour poursuivre ce travail de Mémoire, c’est notre responsabilité.
Merci
Viviane Teitelbaum
Un commentaire
DEGIVES MARTINE
jamais le devoir de mémoire ne devra s’arrêter. J’ai un grand-père qui a été fait prisonnier en Allemagne à la guerre 14-18. Mes parents ont connu la guerre 40-45. Ils ont perdu une petite fille en 1941 et ils ont du enterrer leur petite fille en cachette dans la tombe familiale.
Les années passent mes les horreurs commises pendant la guerre doivent rester éternellement dans nos mémoires et nous devons tous être solidaires avec la communauté juive.