Bloc-notes

« Alors, pauvre étranger, pourquoi continuer à crier ? »

Quand j’ai reçu un appel d’un journaliste il y a quelques jours me demandant si j’étais au courant d’une histoire d’antisémitisme à Aartselaar, j’ai répondu que non. Et en effet, je ne l’étais pas. Car une fois encore, dans la presse belge c’était un silence assourdissant. Puis le blog de Marcel Sel, merci à lui.
Et je me demande vraiment si tout le monde fait mine de découvrir ce qui se passe dans ce pays en ce qui concerne l’antisémitisme ? Et alors je m’interroge sincèrement et me demande si cela sert encore à quelque chose de militer, de s’engager, de crier haut et fort, d’interpeller le Ministre-président, entre autres sur la formation des agents -si je vous assure !-, ou sur l’ encadrement dans les écoles, les clubs sportifs, les éducateurs de rues…
Alors que dans l’affaire de la petite Océane, le parquet classe sans suite, cela nous raconte quoi ? Que l’on peut tout faire, en tout impunité ! En effet… la preuve, sans doute….
Et puis il y a toutes ces insultes et ces attaques, ces graffitis et les propos haineux sur internet et sur les blogs des journaux, qui sont rarement poursuivis, et de toute manière personne n’est finalement jamais inquiété ! Et pendant des années le Centre pour l’Egalité des chances rechignait à porter plainte ou à condamner sans équivoque… récemment cela s’est un peu amélioré, mais jamais il n’a porté une affaire fortement, symboliquement…. Il y a quelques années, j’ai du moi-même avec Didier Gosuin et feu Jacques Simonet porter plainte dans une affaire sans que le Centre pour l’Egalité des chances ou le MRAX ne viennent à nos côtés. Pire encore, quand nous avons défendu, au Parlement bruxellois, la proposition de résolution contre la résurgence de l’antisémitisme, le MRAX, par la voix de son président de l’époque R. Bouhlal, est venu témoigner en commission et expliquer pourquoi il fallait remplacer le mot « antisémitisme » par « racisme » ! Finalement, à force de détermination, nous avons pu obtenir que les deux termes soient mentionnés…
Et la presse, si prompte à réagir dans d’autres dossiers, ne dénonce que très rarement, spontanément, de tels faits, pourtant gravissimes !
Je me rappelle de l’incident du train « les Juifs sont priés de descendre à Auschwitz » ou de celui de la petite Océane où j’ai du moi-même déclencher une réaction… Dans quelle démocratie vit-on ?
Et puis j’avoue ce petit moment de lassitude, de découragement. Dois-je réagir ? Continuer encore ? Et cela me rappelle une belle histoire juive.
« Il était un homme résolu à sauver une cité. Il y arriva jeune, énergique, vigoureux, déterminé. Il alla de rue en rue, d’école en école, de marché en marché, exhortant les gens à n’être plus indifférents.
Au commencement, les gens l’écoutaient car ils étaient amusés par ses propos. Puis ils s’arrêtèrent d’écouter. Après de longues années, un enfant l’aborda un jour dans la rue.
« Pauvre étranger, lui dit-il, pourquoi, fais-tu cela ? Tu ne vois donc pas que cela ne sert à rien. »
« Je le sais. »
« Alors pourquoi continuer à crier ? »
« Je vais te le dire. Au début, je croyais que si je criais assez fort, je parviendrais à les changer. Maintenant je sais que je ne les changerai jamais. Mais si je crie toujours, et de plus en plus fort, c’est parce que je ne veux pas qu’ils me changent, moi ».

Si je suis engagée en politique c’est parce que j’y crois. Parce que je pense que l’on peut changer les choses. Si. Et c’est pour cela que – ne m’en voulez pas- je continuerai à dénoncer, à me fâcher, à ne pas laisser passer… Car je le sais, j’ai appris l’Histoire : l’indifférence tue plus encore que les mots et les maux…

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