Réplique à un gouvernement bruxellois de gauche alors que la Région s’appauvrit….
Ma réplique pour le MR au parlement bruxellois, comme cheffe de file en Cocom, à la déclaration de politique générale ( DPG) de ce gouvernement.
Monsieur le Ministre-président,
Mesdames et Messieurs les ministres et Secrétaires d’Etat,
Cher-e-s collègues,
Lorsque l’on entame une réflexion sur l’action de ce Gouvernement au cours des quatre dernières années pour la Cocom, seule l’image d’une montagne qui accouche d’une souris me vient à l’esprit.
Ce n’est finalement qu’en fin de législature que nous apprenons, par voie de presse, l’aboutissement de certains dossiers phares de votre politique. Entre-temps il semble bien que ce gouvernement se soit égaré en chemin : études, contres-études, un temps passé à tergiverser, des déclarations, de belles intentions et des textes qui se font toujours attendre alors que la situation, sur le plan de l’aide aux personnes et de la précarité à Bruxelles ne fait que se dégrader.
Commençons justement par le « Plan de lutte contre la pauvreté 2014-2019 ». Outre l’ironie de son timing et le fait de s’apercevoir que depuis son annonce dans la presse en juillet dernier soit mi- 2018, celui-ci n’a été publié qu’il y a deux jours, je regrette de le voir se résumer à une suite de constats sur la situation actuelle et à des louanges sur l’action accomplie.
Mais de quoi pouvons-nous nous réjouir, Monsieur le Ministre-Président ?
Aujourd’hui, 33% des Bruxellois-es vivent sous le seuil de pauvreté. Ce chiffre est d’autant plus interpellant lorsqu’on connaît le risque d’un nombre considérable de Bruxellois-es qui risque de tomber sous le seuil de pauvreté en particulier pour les familles monoparentales. Sachant que là encore, ce sont les femmes qui, en Région bruxelloise, endossent pour 86,6% la responsabilité d’être cheffe de ces ménages.( entre parenthèse cette spécificité des famille mono parentales à Bruxelles n’est même pas évoquée dans votre DPG)
Alors oui, vous nous avez entretemps présenté l’ordonnance sans-abrisme qui doit contribuer de manière concrète à lutter contre la grande pauvreté au sein de notre Région. Celle-ci manque toutefois d’objectifs clairs et d’ambition mais nous l’avons assez dit en commission.
Nous regrettons essentiellement la disproportion des moyens accordés entre l’aide d’urgence et l’aide à la réinsertion. Disproportion qui s’exprime, entre autres, dans le chèque en blanc signé au « New Samusocial » alors que pareille disposition, ou budget précis, n’est pas accordée à la réinsertion. A ce sujet, j’aimerais vous signaler que le fait d’accorder des budgets supplémentaires à l’aide d’urgence n’est pas en soi une solution au problème. Depuis le temps que nous continuons à augmenter le budget, les besoins continuent de croitre ! Déjà il y a deux ans j’ai présenté une comparaison entre les villes comme Bruxelles qui donnent priorité à l’aide d’urgence aux villes qui comme Helsinki favorisent l’aide structurelle, la réinsertion et travaille sur le long terme. Et que voit-on ? Une ville qui se paupérise M. le Ministre Président. Et qui justement accroit les inégalités et renforce cette dualisation que vous dites vouloir combattre. Alors que depuis 2004, la gauche ( avec ses variations) est au pouvoir et la situation s’empire, mais heureusement vous évoquez la dualisation, on se sent déjà mieux.
J’en viens ensuite à un autre sujet récent de l’agenda et encore en cours i.e. le parcours d’intégration obligatoire pour les primo-arrivant-e-s.
A quelques mois de la fin de la législature, un accord entre les différentes entités fédérées a enfin été ratifié. Accord, d’accord, mais qui ne sera finalement opérationnel qu’à partir de 2020 !
Sur le dossier des allocations familiales, il est vrai qu’un nouveau cadre a été voté fin mars, mais toujours aucune mesure d’exécution en perspective. Vous aviez par exemple promis de nous transmettre ces projections budgétaires en dépenses et en recettes. Nous n’avons toujours rien reçu. Existent-elles ?
Déjà, pourtant prévu dans la Déclaration de Politique Générale de 2014, là aussi, il vous aura fallu pas moins de 4 années, Medames, Messieurs les Ministres, pour élaborer le Plan santé bruxellois. Alors bien sûr, il faut du temps pour la concertation, pour réunir les acteurs du secteur et les différents partenaires sociaux, pour pallier l’éclatement des compétences et, enfin, mettre au centre de la stratégie les besoins des Bruxellois-es.
De la concertation à la création d’une nouvelle méthodologie attribuée à l’Observatoire de la santé et du social, vous êtes passés à la création d’un énième OIP en mai dernier. Iriscare fonctionne-t-il ou ne fonctionne-t-il pas, je m’interroge très certainement puisque le texte même du Plan santé bruxellois ne nous a toujours pas été présenté, pas plus que les ordonnances d’exécution pour les allocations familiales dont Iriscare aura la charge. D’ailleurs, ce Plan, ne nous l’aviez-vous pas promis pour le 25 septembre, Monsieur le Ministre ?
Nous apprenons donc que votre plan est articulé autour de 3 axes, 17 objectifs et quelque 45 mesures dont seules 8 nous sont aujourd’hui communiquées. Pourriez-vous par exemple nous indiquer de quelle manière et par quels moyens votre mesure de « Démocratie sanitaire », qui prévoit la participation des citoyen-ne-s à l’architecture des soins de santé, sera-t-elle opérée ?
Vous parlez d’un test d’impact santé : disposez-vous des marges nécessaires (humaines et budgétaires) pour rectifier l’orientation des politiques mises en œuvre ?
Un point évidemment absent de cette DPG, est celle des femmes. Femmes sans abris, femmes monoparentales, besoin des femmes en terme de santé ( c’est une matière entièrement genrée ce qui ne transparait pas), femmes victimes de violences, etc.
Femmes sans abris, dans une publication des femmes prévoyantes socialistes, on souligne qu’entre 2008 et 2016, le nombre de personnes comptabilisées par la Strada à Bruxelles a pratiquement doublé. Elles s’interrogent sur la faible proportion de femmes sans-abri, alors que la précarité et le mal-logement les impactent autant voire plus durement. Les FPS citent Ariane Dierickx, directrice générale de l’ASBL L’Ilot qui confirme « invisibilisation » des femmes sans-abri, qui se cacheraient ou se masculiniseraient pour se protéger d’un environnement perçu comme hostile. « Conscientes que la rue est un territoire appartenant aux hommes, elles seraient en réalité plus nombreuses que le chiffre annoncé, mais se cacheraient simplement plus ». Et comme tout est dans tout, les FPS notent aussi qu’une femme sur deux hébergée en maison d’accueil a été victime de violence intrafamiliale que ces violences sont dans un continuum : dans les lieux de survie, dans certains hébergements ou en rue.
Vous, M. le Ministre Président vous n’en parlez jamais. Pourtant et je l’ai rappelé l’année dernière dans le cadre de la lutte contre les violences genrées, un plan d’action national couvrant les années 2015 à 2019 a été lancé afin de mettre toutes les institutions à contribution. Bruxelles a également sa part de responsabilité. Je ne vais pas me répéter, mais qu’en est-il par exemple de l’examen de la possibilité de développer un système d’enregistrement des cas de mariages forcés et de définir les dispositifs à impliquer dans ce cadre » ? l’année dernière vous ne m’avez pas répondu. Qu’avez-vous fait depuis et qu’avez-vous fait concernant les autres engagements qui revenaient à Bruxelles ?
Pour conclure, si je me réjouis que les politiques de santé et des affaires sociales à Bruxelles soient dorénavant envisagées sous un angle « stratégique, global, complexe et évolutif, prenant en compte les réelles difficultés des Bruxellois », je regrette que vous fassiez peser sur la prochaine législature le poids de vos (ir)responsabilités.
Merci